100%
CURTAIN

Casablanca

Rétrospective
vendredi 14 mars à 18:00
Capitole - Cinémathèque suisse - Salle Lucienne Schnegg
De Michael Curtiz
Avec Humphrey Bogart, Ingrid Bergman, Paul Henreid
États-Unis, 1942
102’ / VOSTF / Copie numérique 4K / 12 (12)

Oscar du meilleur film en 1943, cette histoire d’amour tourmentée sur fond de Seconde Guerre mondiale est sublimée par le couple mythique Bogart-Bergman, symbole ultime du romantisme moderne de l’époque Dans son night-club marocain, le cynique Rick Blaine (Humphrey Bogart) ferme les yeux sur la misère de la Seconde Guerre mondiale jusqu’à ce que son ancienne amante, Ilsa Lund (Ingrid Bergman), entre dans la pièce, forçant Rick à choisir entre vivre avec la femme qu’il aime ou devenir le héros dont elle a besoin… Mélodrame emblématique de l’âge d’or du cinéma hollywoodien, Casablanca séduit, au-delà de la fluidité de sa mise en scène et de son interprétation fiévreuse, par sa capacité à contourner les clichés et à traduire, par le prisme de l’intime, l’atmosphère troublée d’une société au destin tragique.


S’engager ou pas ? Avec qui ? Pourquoi ? Tous les personnages principaux de Casablanca s’exposent à ces questionnements autant politiques que sentimentaux. Pourtant, le cynisme de Rick, patron d’un bar américain à Casablanca début décembre 1941 (alors que les États-Unis ne sont pas encore engagés dans le conflit mondial), paraît le tenir éloigné de toute velléité d’engagement : il éconduit une cliente enamourée, refuse sa protection au tueur de deux soldats allemands… jusqu’à ce qu’Ilsa pénètre dans son bar, au bras de son résistant de mari. Avec elle, ce sont ses engagements passés qui refont irruption : son antifascisme aux côtés des Républicains espagnols et ses désirs de mariage avec Ilsa. Dès lors, quel fil renouera-t-il ? Celui de l’engagement politique ou celui de l’engagement amoureux ?

Jusqu’au bout, nul ne le saura, tant Rick, attablé seul à jouer aux échecs avec lui-même lors de sa première apparition, s’ingénie à tisser une stratégie aussi solitaire qu’indéchiffrable : évoluant dans des espaces systématiquement doubles (une France non occupée, mais pas libre pour autant ; la deuxième salle, privée, de son bar), Rick manie sans cesse le double langage, tout comme le préfet Renault. En parallèle de l’histoire d’amour, le film s’attache d’ailleurs tout autant à l’évolution de cet autre duo, qui passe de l’attentisme à l’engagement, une poignée de jours avant Pearl Harbor : ils incarnent ainsi l’alliance de la France libre et des États-Unis, dans ce Casablanca (la ville / le film) dont le cosmopolitisme antinazi constitue déjà un appel à la résistance.

Laurent Le Forestier (CEC Unil)